dimanche 8 janvier 2012

Liberté, égalité... même pour les gays !

Abolir la dernière grande discrimination
pour renforcer notre civilisation.


« Nous croyons aux liens qui unissent, que la société est plus forte quand nous faisons des vœux et quand nous nous soutenons les uns les autres. » 
David Cameron, premier ministre britannique.



« Mal nommer les choses, c’est ajouter au malheur du monde » disait Albert Camus. C’est pourquoi je ne défends pas le « mariage gay », une expression impropre et néanmoins massivement utilisée par les médias, mais l’égalité des droits pour les couples de même sexe. Car il ne s’agit pas d’inventer un droit spécifique qui serait exclusivement réservé aux homosexuels mais tout simplement de leur ouvrir l’accès au mariage civil. Le seul qui soit. Ni plus ni moins. Idem pour le droit à l’adoption.

Certains arguent encore que les homosexuels ont fait « un choix de vie » et qu’ils doivent en assumer les conséquences. Sauf que l’argument de la responsabilité individuelle n’est pas valide dans ce cas. Avez-vous choisi d’être hétérosexuels ? Non, bien sûr. C’est une évidence qui s’impose à vous. Choisir son orientation sexuelle relève, au mieux, du fantasme (au même titre que choisir la couleur de ses yeux)… au pire, de l’ignorance. On ne choisit pas son orientation sexuelle, que ce soit enfin clair pour tous !

Seule une minorité d’homosexuels voudraient se marier. Moins encore auraient un projet parental. Le mariage serait dépassé, inutile, ringard... mais sacré. Les opposants ratissent large et ne sont pas à une contradiction près. Mais les gays sont comme tout le monde : il existe en leur sein une pluralité d’opinions, de goûts, de choix et de modes de vie. Personne ne peut savoir mieux qu’eux-mêmes ce qui leur convient. Pourtant, ils ne bénéficient pas du même champ de possibilités que les autres couples alors qu’aucun argument scientifique ne s’y oppose. C’est une injustice arbitraire. Tous les homosexuels ne désirent pas se marier ou adopter, loin de là. Mais ceux qui le désirent devraient pouvoir le faire. Avoir le choix : n’est-ce pas la définition même de la liberté ?

Le mariage n'est pas immuable. Au cours de l'histoire, il a été régulièrement modifié. Ces évolutions importantes sont venues traduire les transformations sociales qui ont pétri la société au fil des siècles. On entend encore ânonner « la destruction de la famille ». Pourtant, le modèle familial n’a jamais cessé d’évoluer et il est aujourd’hui parfaitement compatible avec l’homosexualité.  Une société vieillissante, minée par une grave crise économique et un déclin démographique, n’a-t-elle pas intérêt à favoriser tous les désirs de former une famille stable et durable en vue d'avoir, peut être, des enfants, fussent-ils de couples homosexuels ? Dans ce contexte, l’adoption et les techniques de procréation médicalement assistées sont des solutions pour tous. Sans discriminations.

Sur la pléthore d'études et de recherches scientifiques menées par d'innombrables universitaires, médecins ou psy depuis des décennies combien nous prouvent qu'être élevé par deux hommes ou deux femmes est néfaste ou dangereux pour l'enfant ? Strictement aucune ! Les enfants élevés par des couples homosexuels ne vont ni mieux ni moins bien que les autres, c’est aujourd’hui une évidence vécue au quotidien par des millions d'enfants de par le monde. Tout au plus sont-ils dans la situation que vivaient les enfants de divorcés dans les années 1950 ou les enfants métis dans les années 1970. Fallait-il pour autant interdire le divorce et les unions mixtes, au nom du bien être des bambins ?

Le mariage est aujourd’hui un acte laïc qui dépend de la loi civile. S’il y avait un lien entre mariage et filiation, il faudrait alors en exclure tous les couples qui n’ont pas d’enfants, par choix personnel ou parce que confrontés à l’obstacle de la stérilité. Familles monoparentales ou recomposées : le découplage de la fonction parentale et du biologique caractérise notre époque. Le mariage ne fonde plus la famille (60% des enfants naissent hors mariage et 5% des couples mariés n’auront jamais d’enfants). Il n’a plus aucun rôle social, et je considère que c’est un progrès parce qu’il n’est plus une entrave à la liberté individuelle. Il est aujourd'hui possible de vivre en couple et en famille, avec ou sans enfants, hors de l'institution du mariage et de la stigmatisation sociale : il s'agit même du cas majoritaire.

Cependant, le mariage demeure la référence, la forme d’union la plus aboutie sur le plan juridique et symbolique. Il est naturel que ceux qui en sont excluent le réclament, poussés par un besoin de reconnaissance et d’égalité. La société se construit d’abord par les choix des individus qui la composent et pour lesquels la famille demeure la clef de voûte de tout l’édifice social. Elle est le noyau qui permet l’éclosion de la personne libre et la transmission des patrimoines. Les défenseurs de la famille devraient se réjouir de voir une population souvent dénoncée comme communautariste ou marginale vouloir participer au droit commun dans un processus de normalisation. Car le mariage c’est la consécration sociale de l’union de deux personnes ayant pour but la solidarité réciproque sur la base de l’affection mutuelle. Il rassemble tous ceux qui croient en ces voeux solennels, tous ceux qui pensent que la société est plus solide lorsqu’elle soutient les preuves d’engagement et les solidarités familiales. C’est un droit qui correspond à des devoirs existants (communauté de vie, secours et assistance, impôts…) qui sont déjà assumés de facto par les couples homosexuels.

Certains avancent qu'améliorer le PACS suffirait. Mais pourquoi donc conserver deux procédures qui seraient alors identiques ? Interdire l’appellation de "mariage", tel un prestigieux label, aux seuls homosexuels vise en fait à proclamer la supériorité de l’amour hétérosexuel. Or, l’Etat est censé protéger les droits de tous, pas d’établir des hiérarchies entre les citoyens ni d’exclure des minorités de son champ d’action en fonction des convictions personnelles de ses dirigeants. Les homosexuels méritent le même respect des pouvoirs publics que les autres. Ils ne doivent plus être des citoyens de seconde zone au nom de préjugés d’un autre âge car la dignité de l’individu est la condition de sa liberté. D'ailleurs, les citoyens ne sont pas dupes : selon un sondage Ifop de 2011, les deux tiers des Français sont favorables à ce que les homosexuels puissent se marier et 58% soutiennent aussi leur droit à l’adoption.

Ceux qui s’opposent à ce que les homosexuels accèdent à l’égalité des droits tout en s’offusquant d’être taxés d’homophobes m’évoquent ces Américains qui s’opposèrent aux mariages interraciaux jusqu’à la fin des années 1960 mais refusaient de s’admettre racistes. Mais pourquoi donc vouloir interdire à des Blancs et des Noirs qui s’aiment de s’unir si l’on n’est pas raciste ? Quelque chose m'échappe...

Mildred Loving est cette femme noire qui avait épousé un blanc et dont le procès contre l’Etat de Virginie a mis fin à l’interdiction des mariages mixtes aux USA en 1967. Peu avant sa mort elle confiait : « Entourée comme je le suis par de merveilleux enfants et petits enfants, pas un jour ne passe sans que je pense à Richard et à notre amour, notre droit de nous marier, et combien cela signifiait à mes yeux d'avoir la liberté d'épouser la personne précieuse pour moi, même si d'autres pensaient qu'il était le “mauvais genre de personne” pour m'épouser. Je crois que tous les Américains, quel que soit leur sexe, leur race,  leur orientation sexuelle, doivent avoir la même liberté de mariage. Ce n'est pas l'affaire du gouvernement d'imposer les croyances religieuses de certains aux autres. Spécialement si ce faisant, il leur dénie leurs droits civiques […] je suis fière que notre nom à Richard et à moi soit celui d'un arrêt de la Cour qui puisse favoriser l'amour, l'engagement, l'équité et la famille, ce que tant de personnes, noires ou blanches, jeunes ou vieilles, homos ou hétéros, recherchent dans la vie. Je suis pour la liberté de se marier pour tous. » Je n'ai rien à ajouter.